jeudi 5 mars 2009

La naissance racontée par le papa

Il est environ 01H30 jeudi 05 février au matin, et je dors comme un bébé.

Avant de nous coucher nous avions décidé d'aller au cinéma pour forcer le destin. En effet nous avions besoin d'un petit coup de pouce de sa part afin que le "travail" commence enfin.
Je dis enfin car je l'attendais depuis plusieurs jours ce travail, et tous les matins je me levais pour aller au "travail" dépité que ma petite fille ne pointe toujours pas le bout de son nez.

Il est donc 01H30 du matin et je crois bien que je rêvais du film vu quelques heures plus tôt, "l'étrange histoire de Benjamin Button" ; j'étais bien et je voyais de belles images chaudes. Cette lumière dans mes rêves était en réalité celle de notre simulateur d'aube. Vous me direz une aube à 01H30 ça fait un peu tôt mais Jeanne a choisi cette heure pour sa première aube sur notre planète.

Sa maman me regardait dormir et lorsque j'émergeais, un peu désorienté il faut l'avouer, elle me dit les larmes aux yeux "je crois que c'est le moment, elle arrive !"

Normalement faut avoir un sacré courage (ou inconscience) pour oser me réveiller à cette heure ci car je suis de sacré mauvais poil quand on me réveille avant l'heure mais cette fois-ci j'étais le plus heureux des hommes. Ma fille avait décidé de faire notre connaissance. Je me suis levé d'un bond (autant que je pouvais le faire dans mon état), on a petit dejeuné, je me suis rasé et fait tout propre pour ma petite fille. On est resté plutôt zen et après confirmation par téléphone des sages femmes, nous avons pris nos valises direction la maternité à quelques centaines de mètres de là. Une place de parking juste en face et papa court partout avec la valise et le dossier médical de maman !

Nous voici devant les portes du "sas" de maternité. "On vous ouvre" nous répond l'interphone, il est environ 04H00 du matin et les 3 sages femmes qui nous accueillent ont l'air un peu dans le pâté au début. Cependant nous sommes très bien accueillis et quelques minutes plus tard nous voici dans la salle d'accouchement. Je suis habillé tout de bleu avec une charlotte et des protèges chaussures. Noémie souffre et je l'aide comme je peux. Elle ne doit pas boire mais je lui porte de l'eau en cachette (on a failli se faire gauler). Je fais du mieux que je peux avec les conseils que m'a donné Lucia la sage femme. Je me sens totalement inutile mais la principale sage femme a l'air très sûre d'elle et quelque part ça me rassure. Elle est une élève de Chantal et ça aussi ça me rassure, elle ne sera pas surprise par les demandes de Noémie (pourvu que tout se passe comme elle le souhaite).

Noémie perd beaucoup d'eau, on lui change les éponges fréquemment, elle tient bien le coup pour l'instant même si les contractions s'enchaînent à toutes vitesse. La pauvre est comme un boxeur pris dans les cordes et qui prend coup sur coup. La comparaison n'est pas romantique mais Noémie accuse le coup. Elle n'est pas K.O. mais se demande quand même ce qui se passe. Je sais bien que son coeur ne veut pas de péridurale mais sa tête lui crie l'inverse. Elle passe de 3 cm à 8 cm en une paire d'heure mais un mal de dos inopportun la terrasse à chaque contraction. J'appuie de toute mes forces là ou elle a mal pour la soulager mais ce n'est pas suffisant. Elle accepte donc la péridurale un peu avant l'accouchement. Comme le dit la sage femme ça ne sert à rien de souffrir. Les contractions à la fin je les maudissais, si j'avais pu leur mettre une rouste je l'aurais bien fait. Il faut savoir que le monitoring est pour le père le seul indicateur sur la douleur en cours et à venir de la mère. C'était très utile pour moi et je savais quand elle avait vraiment besoin de moi.

Je ne sais pas pour Noémie mais je n'ai pas trop pensé à Jeanne pendant l'accouchement. J'étais plus concentré sur mon épouse qui souffrait. C'est vrai on avait dit qu'on serait 3 et que Jeanne aussi avait du boulot mais cela demande quand même un effort d'imagination, ce n'est pas évident.

Je me sentais en confiance dans cette institution de sainte Monique mais je n'étais pas très à l'aise. Autant la première sage nous a fait une forte impression à Noémie et moi (elle a même cru la reconnaître d'une vidéo sur l'allaitement) autant sa relève me paraissait juste gentille mais moins attentionnée. Que faire, l'autre devait terminer sa journée (nuit ?) de travail comme tout le monde. Je n'allais pas sortir du cache pour qu'elle reste ? Tant pis on a continué avec ce qu'on avait sous la main.

Le docteur M. est arrivé sur ce. Cet homme est très froid mais on a beau le savoir ça fait toujours bizarre. Moi je ne savais pas si tout était normal ou si il y avait la moindre complication. Il pausait 2 ou 3 questions à la nouvelle sage femme. Il tournait autour de Noémie. Ok on avait eu la péridurale mais j'espérais que tout le reste se passe comme Noémie le souhaitait. Elle a essayé en posture mais on ne lui a pas laissé trop le temps de persévérer. Nous dans ce contexte on se sent tout petit. C'est eux les pros, pas nous.

Finalement le docteur décide qu'on va se mettre en position classique; et nous essaierons comme ça environ 30 minutes. Je réalise bien que les poussées de Noémie ne sont pas assez efficaces mais sur le moment tout paraît assez long alors qu'elle n'a essayé qu'une demie heure. Là nous sommes face à l'inconnu. Soit on attend et on prend des risques mais tout pourrait se passer le plus naturellement possible. Soit on utilise la technologie à disposition et on minimise le risque à un chiffre proche de zéro. Tout se passe très vite et le docteur propose fermement la ventouse en disant qu'il guidera juste le mouvement. Après la pose de la ventouse tout s'accélère. J'espère que Noémie vit bien (pas trop mal) ce qui se passe.

Je cogite à toute vitesse, la sage femme appuie sur le ventre de Noémie qui pousse et se déforme, je n'ai aucune idée si ce sera la bonne poussée. J'ai en fait l'impression d'avoir la tête dans le guidon mais je maintiens mon effort. Je suis derrière Noémie à lui tenir les bras depuis les 30 minutes de poussées. Je l'encourage mais je ne sais pas si je suis vraiment utile.

J'observe le médecin qui fait un peu plus que guider Jeanne mais je tiens le cap, je ne réfléchis plus quand soudain... c'est comme si le temps s'arrête, quelques secondes, le temps que cette image se grave dans ma mémoire, le temps que Noémie sente Jeanne "passer" à travers elle. Le temps infime d'une apparition, comme quelque chose d'irréel véritablement, parce que c'est la première qu'on le voit, parce que c'est de notre chair qu'il s'agit. Elle est dans la lumière dans les mains du médecin et le soulagement s'installe avec l'immense joie. Puis vient la communion à 3 sur le ventre de maman où Jeanne fut posée un instant. L'émotion de Noémie se lit sur son visage, on tombe ensemble à la renverse, notre vie ne sera plus jamais la même.

2 commentaires:

Unknown a dit…

J'adore ces récits de naissance...
Comment vas tu depuis ?
Bisous
Magali

racoonnette a dit…

Notre vie a effectivement basculée! Elle est intense et si riche. Comment vas-tu de ton côté? Bises